Programmer le lieu de travail de demain : comprendre, anticiper, accompagner et construire les usages.
Actualités & Points de vues

Le bureau est mort ! Vive le bureau !  

Depuis quelques temps nous le savons : le monde du bureau a changé.
Tout comme notre rapport au travail et à la société dans son ensemble.
Dans ce contexte, s’agit-il de penser une nouvelle programmation, de nouveaux espaces ou un nouveau modèle ? Certainement un peu des trois.

Post-pandémie le télétravail a été le déclencheur - sinon la traduction - d’une réalité nouvelle, différente : le monde du travail ne peut plus être ce qu’il était jusqu’alors. Nouvelle « permission d’autonomie », le télétravail a ouvert des portes que nous ne refermerons pas, avec un fort impact sur l’immobilier de bureau, mais pas seulement.
Depuis trois ans, de nombreuses questions jaillissent, notamment sur la quête de sens au travail, sujet qui nous transcende depuis l’aube de l’humanité. Le rapport au travail est remis en question dans sa triple fonction : instrumentale, sociale et de réalisation de soi. Avant, souvent perçu comme une fin en soi, le travail (re)devient un moyen (à juste titre), et remet en question l’équilibre vie pro / vie perso. 

Or aujourd’hui nous avons assez de recul pour le savoir : notre rapport au travail a changé, car notre rapport à la société a changé. Ce n’est pas forcément le travail qui ne fait plus sens mais la société, notamment pour les jeunes générations, qui aspirent à une cohérence du soi : le soi citoyen, le soi salarié et le soi personnel.
Professionnellement, les lieux de travail se démultiplient, se nomadisent ; les biorythmes des entreprises doivent s’accommoder des choix individuels.

La question se pose donc : quel projet de société global sommes-nous en train de construire ? Comment s’y intègre la vie professionnelle de tout un chacun ? Et, comment la programmation peut-elle accompagner ces nouvelles attentes et ces nouveaux usages ? 

Quel avenir pour le bureau ? Quel avenir pour la programmation ?

Constat : si les discours corporate semblent disruptifs et tournés vers l’avenir, la machine se met lentement en marche : la plupart des entreprises sont actuellement en train de mettre en œuvre la programmation et les évolutions pressenties… en 2021-2022.

Nombreux sont ceux qui revoient leur copie servicielle pour retenir des collaborateurs plus épris de flexibilité. Le font-ils de la bonne manière, vont-ils assez loin, vont-ils trop loin ? Face à une flexibilité et une hybridité des pratiques, des lieux, des modes de communication et de consommation en croissance rapide, la réversibilité et le multi-usages commencent à s’imposer. Tout comme l’hospitality management, qui semble pour certains être la solution à tous les problèmes.

Face à des collaborateurs dont l’attitude laisse les aînés perplexes (« tu veux que le travail soit fait ou tu veux que je sois présent ? »), à quel saint se vouer ? 

• Le bureau, lieu de rencontre et de collaboration ? Plus qu’avant !

Une des évolutions constatées est celle de la part laissée aux espaces collaboratifs, espaces informels et de rencontre dans les nouveaux locaux. Certains font même le choix de pousser le cursus très (trop ?) loin : le nouveau siège social de Novaxia à Paris 15ème par exemple réserve ainsi 80 % des surfaces des 3 500 m² qu’il occupe à des espaces dédiés à de la collaboration formelle et informelle.*

Illustration - bureau assis par terre
bureau assis par terre

• Au bureau comme à l’hôtel ?

La montée en gamme des bureaux pour se poser en espaces serviciels, à l’instar des hôtels, est une réalité grandissante. D’autres s’attachent à décliner des codes résidentiels et hôteliers dans les espaces, en mettant fortement l’accent sur les services, la qualité et la diversité des espaces proposés. La maison Sanofi, flagship européen qu’il n’est plus nécessaire de détailler, en est un exemple parlant.*

Est-ce la bonne direction ?

Si une chose est sure, c’est que le service « gadget » n’est plus plébiscité. Il est plus que nécessaire de remettre le bon service, au bon moment, au bon endroit.
Si les espaces de bureau sont moins fréquentés, ils doivent avoir plus de sens. Le bon service étant celui facilite : le quotidien, les relations, le travail, la collaboration, les réunions, la productivité… en rapport évident avec l’esthétique et le design du lieu certes mais aussi l’insonorisation, l’acoustique, la luminosité. Tous ces éléments s’interconnectent avec un seul objectif : être au service de la facilité de présence et de performance de l’utilisateur.

Le bureau n’a pas à être « cool ». Le bureau doit être efficace, utile. Les mots-clés qui priment doivent être : « fluidité », « facilité », « performance » (des équipements et des espaces). On est entré dans une logique servicielle et esthétique du « moins, mais mieux », en phase avec les nombreux enjeux RSE et économiques, que nous n’abordons pas ici.

Les espaces, qu’ils soient de convivialité ou non, doivent être pensés en phase avec les attentes et les valeurs de l’entreprise. Non pas comme un « gimmick » mais selon les réelles nécessités de sérendipité des collaborateurs, de partage, de cohésion et de production. La restauration d’entreprise, pôle primordial et au centre de la journée de travail, doit aussi s’inscrire dans cette démarche.

Toujours est-il qu’il ne faut pas oublier que l’environnement de travail n’est qu’une manière de traduire la culture de la « boite ». S’il illustre concrètement le niveau d’investissement que l’entreprise est prête à offrir aux salariés, il ne fait pas tout. Accompagner le collaborateur, lui simplifier la vie (professionnellement aussi bien que personnellement), fluidifier son quotidien se construit dans toutes les strates de l’entreprise.

Une approche qui ne peut se passer du change management ou de la data sur les usages et les besoins… Connaître ses utilisateurs et leurs usages, former ses managers, remettre la notion d’humain au cœur des RH, sont des conditions sine qua non du développement du bureau de demain.

 

 

*https://www.lesechos.fr/industrie-services/immobilier-btp/la-chute-de-linvestissement-dans-limmobilier-de-bureau-se-confirme-1934142?utm_source=sendinblue&utm_campaign=Newsletter%20477%20-%2017%20Avril%202023&utm_medium=email

*https://www.knightfrank.fr/blog/2023/04/05/un-marche-ankylosemais-des-volumes-quasi-record-pour-les-commerces L’an passé, les volumes investis sur le marché français des bureaux avaient fortement diminué, totalisant 14,3 milliards d’euros contre 20,3 milliards d’euros en moyenne lors des cinq années précédentes. Le recul se poursuit en 2023 avec un peu plus d’1,3 milliard d’euros investis au 1er trimestre soit un volume divisé par deux par rapport à la même période en 2022 et par trois par rapport au 1er trimestre 2020.

* "Alors que l’activité locative tarde à se redresser dans plusieurs secteurs d’Ile-de-France, l’attractivité du quartier central des affaires n’a presque jamais été aussi élevée. 462 000 m² y ont ainsi été commercialisés en 2022. https://www.knightfrank.fr/blog/2023/01/17/reprise-a-plusieurs-vitesses

https://workplacemagazine.fr/avis-dexperts/20592/bureaux-%C2%A0hotels%C2%A0-ne-passe-t-on-pas-a-cote-du-veritable-enjeu%C2%A0 Guillaume Savard, 01/06/23